En 1898, à Paris, Édouard Debat-Ponsan (1847-1913) présente au Salon La Vérité sortant du puits. Avec ce tableau, le peintre prend une position politique dans l’affrontement qui sépare alors, autour de l’affaire Dreyfus, les « deux France », en faveur du capitaine. Offerte à Émile Zola, la toile est acquise à sa mort par le Musée du Louvre qui la mettra en dépôt au musée de l’hôtel de ville d’Amboise où elle est toujours exposée.
Cet engagement d’Édouard Debat-Ponsan va bouleverser le cours de sa vie. Car si le peintre perd une parti de sa clientèle parisienne, ses choix provoquent surtout une scission brutale avec sa famille originaire de Toulouse. Et cette rupture avec ses racines va avoir des répercussions directes sur son travail.
En effet, en 1900, il vient s’installer à Nazelles-Négron. En choisissant la Touraine comme lieu de « repli », le peintre fait le pari de la lumière. Plus de 80 tableaux de paysages de cette époque sont situés sur la rive droite de la Loire, entre Amboise et Tours. Le peintre pose partout son chevalet : sur la terrasse du château, dans le village, sur les chemins, dans les forêts… Et surtout, l’eau devient un champ d’exploration nouveau pour l’artiste. Fleuve atypique, sauvage, la Loire le fascine.
Cette partie de la Touraine est parcourue par deux petites rivières affluentes de la Loire : la Cisse, qui passe à Nazelles et sert de décor favori au peintre, et la Brenne, qui rejoint la Cisse à hauteur de Vernou-sur-Brenne. Là, les cours d’eau sont réguliers, bordés de files de peupliers, ou tortueux à l’image des troncs noueux qui s’y reflètent.
Avec ce grand fleuve, le peintre nous montre sa trace et la mémoire de « ses frasques » : peut-être voit-il de manière plus symbolique dans ce fleuve vivant, la métaphore du temps qui passe et l’image de la vie avec ses solitudes, ses errances ou ses rencontres décisives.
Certes, la Loire a inspiré de nombreux peintres. Mais l’un d’entre eux a véritablement hérité de la même passion des paysages et de la lumière de la Loire qu’Édouard Debat-Ponsan : Olivier Debré, petit-fils d’Édouard. Et si Olivier n’a pas connu Édouard (il est né 7 ans après sa mort), enfant, il a passé ses vacances à Nazelles, dans la propriété de son grand-père. Il a d’ailleurs reconnu la dette artistique qu’il avait envers lui.
Image d'illustration "Paysage de Loire" Huile sur toile
Chronique écrite par Sophie Payen, Muses de l'Hart