Dès 1933, les conservateurs parisiens se mettent en quête de monuments éloignés des villes et assez vastes pour abriter les milliers de pièces d’art afin de les préserver des éventuels pillages et bombardements. Le Château de Chambord est choisi comme dépôt principal des musées nationaux et gare d’aiguillage vers d’autres refuges, parfois privés : Brissac, Valençay, Fougères-sur-Bièvre, Cheverny, Courtalain,…
Tout doit être fait pour protéger Chambord du feu et des bombardements. À l’été 1939, des tranchées sont creusées pour capturer l’eau de la rivière et deux motopompes à eau sont installées.
Le 28 août 1939, à 6 heures du matin, le plus grand déménagement de tableaux de l’histoire commence et met le cap sur Chambord. En quatre mois, 5 446 caisses contenant les collections du Louvre, ainsi que d’autres musées parisiens et collections privées, quittent la capitale dans 199 camions répartis en 51 convois : direction onze Abbayes et Châteaux de l’ouest et du centre de la France.
Les nazis s’intéressent de près à l’art. Le Troisième Reich entend profiter de ses conquêtes territoriales pour faire également main basse sur des oeuvres d’art. Le Château de Chambord devient alors un lieu de pouvoir stratégique et symbolique.
Les 21 et 22 août 1944, des troupes allemandes entrent dans le parc de Chambord. Ils prennent une quarantaine d’otages et menacent de mettre le feu au Château et aux collections : quatre otages sont exécutés, le Château est épargné.
Quelques jours plus tard, au Château de Valençay. Gérald Van der Kemp, assistant des musées nationaux, qui veille, parmi toutes les oeuvres, sur la Vénus de Milo, les Esclaves de Michel-Ange et les collections du musée Camondo, est arrêté par les SS. Avec aplomb, il leur déclare être le gardien des trésors de France que Mussolini et Hitler ont ordonné de laisser à Valençay pour se les partager après la victoire finale. Il ajoute qu’ils seront supprimés à leur tour s’ils le tuent. Son audace fonctionne : l’homme et les oeuvres sont sauvés.
Au printemps 1945, les oeuvres retrouveront les cimaises des musées.
Chronique écrite par Sophie Payen, Muses de l'Hart