Le Val de Loire est mondialement connu pour ses Châteaux de la période Renaissance. Cependant, cette apparente façade cache un patrimoine roman qu’il faut chercher pour apercevoir.
Origine de l'art roman
Définir le style roman n’est pas une tâche aisée. Les historiens débattent toujours de la période qualifiée de roman. L’on peut prendre l’hypothèse la plus partagée qui est celle du début de cette période à l’avènement des Carolingiens, sur le trône de France, au IXème siècle jusqu’à l’arrivée du style gothique au XIIème siècle. Si la période semble assez succincte, elle est néanmoins à l’origine de nombre d’édifices religieux ou non, dont malheureusement fort peu nous sont parvenus, ce style ayant été jugé comme trop sombre, médiéval.
Ainsi, l’art roman fleurit pendant le moyen-âge. Loin de l’image moderne, le moyen-âge est une période de lumière, de sculptures écrivant la mémoire des hommes et surtout celui de la couleur.
Le style roman est sans doute inspiré ou synthétisant la renaissance carolingienne, sous le règne de Charlemagne et de ses successeurs, et l’architecture ottonienne, celle du Saint-Empire-Romain-Germanique qui emprunte les principes de l’art byzantin.
Bien que longtemps considéré comme un style primitif, il faut attendre le XIXème siècle et Eugène Viollet-le-Duc qui sous l’impulsion du pouvoir français va être chargé de relever le patrimoine architectural français comme Notre-Dame de Paris ou encore la basilique de Vézelay.
L'art roman dans le Val de Loire
Commençons donc notre aventure à Tours. Saint-Martin de Tours eu le droit à une basilique pour servir de mausolée à sa dépouille et abriter le culte qui lui fut voué. Devenant collégiale et plus tard incendiée, cet immense ensemble fut remanié dans un style roman. Les vicissitudes de l’Histoire font que les voûtes s’écrouleront et elle sera rasée en 1802. Nous conservons tout de même deux témoignages d’ampleur de cette collégiale que sont la Tour Charlemagne (nommée à la faveur de la visite de Charlemagne en 800 dont l’épouse, Luitgarde, décèdera à Tours et sera inhumée dans les fondements de cette tour) et la Tour de l’Horloge. A la vue de ces deux tours, l’on ne peut que constater la puissance massive qui en émane. En effet, le style roman intervient dans une période troublée où l’art doit trouver sa place au sein d’un univers de méfiance, où les monuments les plus important doivent être conçus comme des forteresses.
Reprenons notre baluchon et poursuivons vers Bourges. Rendons-nous au portail méridional pour découvrir une autre facette de l’art roman la sculpture. Après avoir découvert cette Cathédrale gothique de Bourges, la surprise est de taille de voir apparaître ce portail typiquement roman. En effet, lors de la reconstruction de la Cathédrale au début du XIIIème siècle, le portail roman daté de 1160 fut démonté et replacé comme ornement d’un portail secondaire. Le travail magistral du sculpteur et les restes de polychromies font de ce portail, riche des douze apôtres et de nombreuses références à la Bible, un témoignage extraordinaire du roman au sein du Val de Loire.
Poursuivons notre périple avec Chartres. Autre témoignage d’importance la façade occidentale dans la Cathédrale et son portail royal qui date des années 1140-1150. A cette époque, ce ne sont pas moins de 24 statues et 300 figures qui font ce décor encadrant les 3 portes de cette entrée principale. Lors de notre observation de cette merveille du style roman on y retrouve à l’envie des scènes de l’Ancien et du Nouveau Testament qui y sont abordés sous le couvert du monde contemporains. L’on découvre ainsi les maisons, les métiers, les instruments de musique, les étoffes qui composent la vie du XIIème siècle. L’on perçoit aussi la façon dont sont interprétés les textes religieux à cette époque, toutes les époques et tous les styles s’essayeront à interpréter les évènements bibliques. Ainsi comme les femmes et les hommes de cette époque nous pouvons percevoir l’enseignement religieux accessible à tous lettré ou non. La richesse principale de cette cathédrale reste son ensemble de vitraux. Le vitrail est un élément important de l’art roman même si peu d’exemple de cette époque nous sont parvenus … L’on peut tout de même évoque Notre-Dame-de-la-Belle-Verrière, datée de 1180 dont le bleu a fait la célébrité de Chartres. Le chantier de la Basilique de Saint-Denis, nécropole des Rois de France, permet la découverte en 1140 du « bleu roman », ce bleu est omniprésent à Chartres et l’on parlera alors du « bleu de Chartres). N’oublions pas les verrières de la façade occidentale, l’Enfance du Christ, baie axiale de 11 mètres de haut sur 3,80 de larges est considérée comme la plus grande baie du XIIème siècle en France. La visite de la Cathédrale n’est donc pas sans intérêt pour le voyageur à l’œil averti ou non.
Continuons notre zigzag et dirigeons-nous vers le Loir-et-Cher et plus précisément dans la petite commune de Lavardin. L’un des plus beaux villages du Val de Loire s’offre au sein de la campagne paisible. La commune est connue pour son Château médiéval en ruine du XIème siècle mais le véritable trésor repose entre les murs de son église.
Château médiéval de Lavardin
L'église romane datée de la fin du XIème siècle, fondée au sein d’un prieuré, son clocher surprend le visiteur mais la surprise est tout autre lorsque l’on pénètre dans l’édifice. L’on découvre une autre facette de l’art roman : la peinture murale. Bien que réalisée à partir du XIIème siècle, elles sont de style roman. L’on y trouve une grande partie de l’iconographie du roman : le baptême du Christ, l’Arbre de Jessé, le Lavement des Pieds, la Passion, le Purgatoire, l’Enfer, le Paradis, … n’oublions pas le Christ roman dans le chœur qui est une merveille de détails. En bref, un incontournable de l’art roman du Val de Loire.
Intérieur de l'église romane de Lavardin
Dernière étape de notre pérégrination : Fontevraud. Fondée par Robert d’Arbrissel en 1101, elle est aujourd’hui considérée comme l’une des plus grandes cités monastiques. Elle a bien changé depuis sa fondation mais l’empreinte romane y est toujours présente. Dans l’église vous pourrez admirer les quatre coupoles de la nef, les croisillons en arc brisé, les culs-de-four des chapelles rayonnantes ou encore l’élévation du chœur qui donne une idée précise de l’église « rêvée » du style roman. Cet ensemble va ouvrir sur le style gothique qui se veut bien plus flamboyant et rayonnant. Dernier témoignage « vivant » du style roman à Fontevraud : les gisants. En effet, Henri II Plantagenêt y sera inhumé en 1189, Richard Cœur de Lion en 1199, Aliénor d’Aquitaine en 1204 et Isabelle d’Angoulême en 1249. Cette nécropole des Plantagenêt nous offre un témoignage supplémentaire sur le style roman, l’on retrouve ainsi richement couchés les défunts dans de sublimes étoffes aux couleurs flamboyantes. Dans le même style que les portails de Bourges et de Chartres, ce sont les proportions qui offrent à ses gisant une réalité plus importante au point que l’on pourrait presque les croire seulement endormis.
Gisants Abbaye de Fontevraud - Photo Kevin, Monachie Britannique
Bien d’autres lieux que ce soit églises, chapelle, les cryptes de Saint-Avit et Saint Aignan d’Orléans, l’église abbatiale de Saint-Benoît sur Loire ou encore la sublime crypte de la Collégiale de Saint Aignan sont des témoins vivants de ce que furent le travail des Hommes et leur souci de l’art en cette période troublée.
Crypte Saint Aignan - Johnatan Savarit, 1001 Patrimoines
Eglise Ste Trinité à Vernou-sur-Brenne
Eglise Saint Nicolas de Tavant
Chronique écrite par Pépite 1991
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